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Le prochain Congrès de l’Association Mondiale de Psychanalyse (AMP), dont le thème est l’aphorisme de Lacan « Il n’y a pas de rapport sexuel », est une occasion pour mettre au travail la relation du sujet avec le phallus, « obstacle »[1], selon Lacan, au rapport entre les sexes. À partir de là, il revient au réseau Toxicomanie & Alcoolisme (TyA) du Champ freudien d’interroger la proposition de Lacan selon laquelle la drogue « permet de rompre le mariage avec le petit-pipi »[2].
Une des premières lectures qui éclairent ce propos est celle proposée par Éric Laurent en 1988 : il s’agit d’une rupture avec la jouissance phallique. Néanmoins, il interroge : l’écrit-on φ0 ou Φ0 ? Les Conversations d’Arcachon, Antibes et Angers[3] n’avaient pas encore eu lieu. S’agit-il « d’un nouveau mode de jouissance, ou plutôt d’un trou de jouissance » ? L’auteur, plusieurs années plus tard, propose un contrepoint indiquant qu’il s’agirait de « couper le lien avec la queue », allusion, semble-t-il, à l’organe. La distinction conceptuelle que Lacan fait entre la jouissance phallique et la jouissance pénienne, contemporaine de la thèse de rupture, paraît cruciale pour notre investigation.
Fabián Naparstek montre que l’inscription du phallus est ce qui fait de l’organe un instrument. L’usage de la drogue peut mettre en fonction l’organe, à défaut de l’effet de la parole, mais peut aussi, au contraire, relever de l’insoumission au service sexuel[4], comme le propose Jacques-Alain Miller. Comment penser, dès lors, la relation de la toxicomanie à la psychose, où la rupture avec le phallus est structurelle ?
La thèse de rupture invite alors à rechercher comment le toxicomane fait usage du toxique là où l’organe n’est pas devenu instrument, pour répondre aux avatars de la rencontre sexuelle. Comme le demande J. Santiago, l’utilisation du toxique permettrait de traiter une jouissance du sens qui gravite autour de l’organe, quand il y a un trou dans la signification phallique ?
La thèse de rupture permet-elle une élucidation du syntagme « il n’y a pas de rapport sexuel »? L’hypothèse de Jean-Marc Josson consiste à dire que la drogue permet de rompre avec l’effet de l’affect propre du signifiant en percutant le corps. Est-ce donc une tentative de traitement de la jouissance délocalisée dans le corps qui ne se limite pas à l’organe ?
Une selection d’extraits de textes et quelques références bibliographiques vous sont ici proposées. Bonne lecture !
Tomás Verger
Éric Laurent, « Trois remarques sur la toxicomanie » (extraits)
Dans son enseignement, on ne peut pas dire que Lacan ait considéré que la psychanalyse ait beaucoup à dire sur la drogue, puisqu’au fond, en le parcourant de fond en comble, on ne trouve que quelques phrases ; mais il nous donne tout de même, dans les années soixante-dix, cette indication majeure : la drogue, seule façon de « rompre le mariage du corps avec le petit-pipi»[5]; disons : avec la jouissance phallique. C’est une indication précieuse. D’ailleurs elle supporte, je crois, toute une réflexion que plusieurs personnes qui s’occupent de toxicomanes ont faite, de considérer que la toxicomanie n’est pas un symptôme au sens freudien et que la toxicomanie n’est pas consistante. Rien, dans la drogue, ne nous introduit à autre chose qu’à un mode de rupture avec la jouissance phallique. Ce n’est pas une formation de compromis, mais une formation de rupture. Cela pose le problème de comment écrire la rupture de cette jouissance phallique. La note-t-on φ0 ou Φ0[6] ? Et comment va-t-on déterminer, différentiellement, s’il s’agit d’un nouveau mode de jouissance, ou plutôt d’un trou de jouissance ?
Effectivement, cette expression de « rupture avec la jouissance phallique »[7], Lacan l’introduit aussi bien dans la psychose – où il la note Φ0, comme conséquence[8] de la rupture, rupture de l’identification paternelle disait Freud, et pour Lacan, de la fonction des Noms-du-père – qu’il note P0. Au lieu que les Noms-du-père produisent la signification phallique de ce qui est dit, on a ce couple de termes dans la psychose, P0 – Φ0, dont Lacan se demande, à un moment donné, si l’un implique nécessairement l’autre, ou s’il peut y avoir l’un sans l’autre[9].
Pour la psychose, je ne sais pas. Mais sûrement, l’utilisation du toxique amène à penser qu’il peut y avoir production de cette rupture avec la jouissance phallique, sans qu’il y ait pour autant forclusion du Nom-du-père. C’est là d’ailleurs la conséquence de la thèse, soutenue jusqu’au bout, que le toxicomane n’existe pas ou que la toxicomanie n’est pas un symptôme.
La thèse de Lacan à propos de la toxicomanie est donc une thèse de rupture. Sa brève remarque, en ce sens, pour brève qu’elle soit, est néanmoins une thèse qui engage foncièrement toute sa théorie de la jouissance, ainsi que celle de la place du père et de l’avenir du Nom-du-père dans notre civilisation.
[…]
La première conséquence, donc, de la petite phrase de Lacan, c’est la rupture avec les Noms-du-père obtenue hors la psychose. La deuxième conséquence qu’il faut en tirer, est celle d’une rupture avec les particularités du fantasme. Rupture avec ceci que le fantasme suppose l’objet de la jouissance en tant qu’il inclut la castration. C’est par là que nous pouvons soutenir avec beaucoup de sûreté que le toxicomane n’est pas un pervers. Il n’est pas un pervers, parce que le pervers suppose l’usage du fantasme. La perversion suppose un usage très spécifié du fantasme. Tandis que la toxicomanie est un usage de la jouissance hors du fantasme ; elle ne prend pas les chemins compliqués du fantasme. C’est un court-circuit. La rupture avec le « petit- pipi », comme dit Lacan, a comme conséquence qu’on peut jouir sans le fantasme.
[…]
il me semble qu’on peut traiter la toxicomanie comme le surgissement dans notre monde d’une jouissance Une. En cela, elle n’est pas sexuelle. La jouissance sexuelle n’est pas Une ; elle est foncièrement brisée, elle n’est appréhendable que par le morcellement du corps.
* Texte intégral publié dans Quarto n. 42. Bruxelles, déc. 1990, p. 69-72.
Éric Laurent, « Un modèle digne pour les institutions que nous voulons » (extraits)
Rosa Elena Manzetti dans Pharmakon présente le cas d’un sujet se droguant pour rester éveillé pendant que deux prostituées faisaient l’amour devant lui. Tandis qu’il regardait avec fascination, il essayait de voir une femme qui jouissait et insistait pour obtenir cette jouissance supplémentaire du regard, voir ce qui ne peut pas être vu. Ensuite, il était hors-jeu et, avec la cocaïne, il restait à ce niveau d’excitation lui permettant d’aller plus loin tout en se séparant en même temps de la jouissance phallique. C’est dire qu’il ne voulait pas entrer dans le jeu et, en même temps, il restait fasciné par cette jouissance féminine qui lui était imposée. Se vérifiait alors ce que ce sujet voulait voir à savoir, ce que lui avait été imposé comme expérience dans son enfance, soit vérifier l’absence de pénis chez la mère. Et alors, il est donc intéressant de voir que ces scènes n’ont pas été réalisées uniquement avec des femmes. Il les a réalisées aussi avec deux travestis qui, dans des jeux érotiques, étaient obligés de garder leur culotte, jusqu’à ce que, au dernier moment, se vérifie la présence du pénis. On voit ici que le travesti est présenté comme l’incarnation de la femme phallique.
Dans ce cas présenté par R. E. Manzetti, on voit les deux registres : d’abord la neutralisation, c’est le Φ0 comme neutralisation phallique, mais en même temps, il y a la fascination pour l’exhibition du phallus maternel. Et l’un n’empêche pas l’autre – c’est intéressant dans le cas –la dialectique avec laquelle les choses s’articulent.
[…]
Par ailleurs, la toxicomanie nous enseigne – le cas présenté par R. E. Manzetti[10] le prouve – sur le lien fondamental entre toutes ces substances toxiques et la fascination de l’homme pour la jouissance féminine.
L’Antiquité avait pour maxime que Vénus et Bacchus allaient de pair, que l’ivresse du vin devait se terminer au lit.
La non-sagesse moderne fait justement l’inverse, elle rompt avec la jouissance phallique, mais renforce (ce qu’il ne faut pas oublier dans le cas de R. E. Manzetti, c’est la fascination de l’homme pour le travesti qui parait confirmer cette perspective) l’assujettissement de l’homme moderne au surmoi, qui n’est pas un surmoi maternel, mais le surmoi de la jouissance féminine.
L’homme et la femme modernes se trouvent confrontés à ce qu’écrit Lacan dans « L’étourdit », soit à cette reformulation de l’énigme du Sphinx proposée à Œdipe et que Lacan formule à partir de la jouissance féminine – le Sphinx comme incarnation de la jouissance féminine. Il ne s’agit pas de l’homme, mais de savoir si le petit homme devant elle sera à la hauteur de la tâche de satisfaction féminine ; et c’est la raison pour laquelle, dans « L’étourdit », Lacan commence son exorde avec le Sphinx qui parle et qui dit « Tu m’as satisfaite petithomme » [11] (cela permet la lecture de l’affaire).
Il y a toujours eu une fascination des hommes, pour la jouissance féminine. Il est clair que les anthropologues pensent parfois que l’homme a appris à compter sur les doigts de sa main : un, deux, trois, quatre, cinq. Cela me semble être une idée de philosophe, je pense que si l’homme apprenait à compter, nous aurions la trace que dans de nombreux systèmes de numérotation, ce qui existe est : un, deux, trois… l’infini. Un, deux, trois et bien plus encore, une catégorie de « bien plus ».
[…]
Ceci, me semble-t-il, est conforme à l’idée selon laquelle les hommes ayant une jouissance phallique ont commencé à savoir qu’il y a une, deux, trois fois par nuit et puis c’est beaucoup, c’est peut-être plus proche de la modalité avec laquelle ils ont appris à compter…
Passer de l’Un, comme dénombrable, à la jouissance qui paraissait fascinante, de la « Déesse blanche » [12], non comme incarnation de la mère, mais de « La femme » [13], c’est ce qui me semble rendre compte de la figure de Dieu comme incarnation de la jouissance féminine – comme le souligne Lacan. Dans ces traces des déesses de la Méditerranée, la figure féminine s’incarne en Diane d’Éphèse comme représentante de l’Antiquité romaine. Elle est l’incarnation du Dieu contre lequel Moïse a su poser une limite et donne l’idée de l’introduction du point à partir duquel on ne peut plus compter.
C’est la fascination pour l’infini, pour le surmoi féminin dans la situation de l’homme moderne, de l’homme des droits de l’homme – qui n’a plus de figures héroïques auxquelles s’identifier – qui renforce l’incidence de ce surmoi et le rêve d’un type de transsexualisme de la jouissance [14] que l’on pourrait obtenir avec la jouissance des drogues.
En ce sens, nous trouvons une autre signification de la rupture avec le phallus[15], qui pourrait nous guider dans cette voie : essayer de nous identifier à cette jouissance du surmoi, que ce soit du côté de l’homme ou du côté de la femme.
* Texte intégral paru en espagnol :« Un modelo digno para las instituciones que queremos » in Sillitti, D., Sinatra, E. y Tarrab, M. Del hacer al decir. La clínica de la toxicomanía y el alcoholismo. II Jornada del Instituto del Campo Freudiano. Buenos Aires, Plural editores, 1996, p. 61-80.
Éric Laurent, « La place des hommes dans la cité des femmes » (extraits)
La figure du machiste jouisseur à la Trump est une sorte de pantomime de ce qui serait le sans limite de la jouissance féminine, comme celle du drogué qui veut s’affranchir, par l’illimité de la drogue, de la retombée phallique. L’enjeu de l’articulation des deux jouissances, la jouissance phallique et son au-delà, est de situer ce qui fait que quelque soit l’égalité des droits, une femme reste toujours radicalement Autre pour un homme. Et c’est alors qu’elle peut être symptôme et non surmoi infernal et mortifère. La jouissance dans la cité des femmes, où les hommes ont leur place selon Lacan, n’a rien d’un hédonisme. Elle se sépare entre ce qui est la jouissance au-delà de la limite phallique, celle qu’au-delà de la castration l’homme imagine, et l’illimité qui se civilise par son inscription du côté féminin de la sexuation. Il n’y a pas de chiffrage pour ça quelque soit la forme du Un considéré. Le déclin des idéologies, des grands récits de ce qui faisait l’universel du bien commun sous la forme d’un idéal partagé met au jour une concurrence entre jouissances multiples qui ne peuvent se résoudre dans l’unité.
[…]
C’est l’invention. L’expérience trans, c’est inventer l’organe qui rendrait compte de celui qu’il faudrait au corps et qui permettrait de se débarrasser de l’obstacle phallique. Lacan le dit très bien : le phallus est ce qui fait obstacle à ce qu’on jouisse du corps de l’autre. Eh bien, parfait, coupons-le et inventons ensuite l’organe qu’il faudrait. C’est un processus absolument fantastique qui met en jeu tous les savoirs de la science – tout ce qu’on sait faire avec les hormones, la chirurgie plastique – pour une invention de savoir. C’est un processus sans fin, car l’organe qu’il faudrait ne se rencontre pas ; alors, il faut continuer à inventer.
* Texte extrait de la conférence prononcée à l’occasion de la Semaine Lacan « Hommes et femmes selon Lacan », 13-18 mai 2019, ACF-VLB, disponible sur YouTube
Éric Laurent, « Portrait de Joyce en Saint homme » (extraits)
Grâce à son rapport à son inconscient, Joyce n’est pas un saint, il a l’orgueil de son art. Il a l’« art-gueil », et Lacan ajoute « jusqu’à plus soif », première notation où s’inscrit le rapport au toxique, l’alcool, qui contribuera fortement, avec la syphilis, à la dégradation de la santé de Joyce[16]. Son frère Stanislas attribuait à des comas éthyliques l’aggravation de ses troubles ophtalmiques[17]. Commencées à Dublin après la mort de la mère[18], les alcoolisations massives se multiplient[19] après sa paternité, à Trieste, et vont scander sa vie à Zurich et à Paris jusqu’à la perforation de l’ulcère duodénal.
* Texte intégral publié dans Mental, n. 35, Paris, 2016, p. 62-73, republié dans Laurent E.,
L’Envers de la biopolitique. Une écriture pour la jouissance, Paris, Navarin, 2016, p. 151.
Éric Laurent, Conversation autour de « Réflexions sur trois rencontres du féminisme avec le non-rapport sexuel » (extrait)
Je ne dirais pas qu’il y a deux sexes ou deux jouissances, je dirais plutôt l’Unarisme. Il y a la jouissance de l’organe et il y a la jouissance féminine. Et il y a une seule jouissance en tant que telle. Et il n’y a qu’une seule jouissance sexuelle. Toutes les expériences LGBT en font l’expérience. C’est une expérimentation de la façon dont la jouissance de l’organe, la jouissance (sexuelle), se décline en tant que telle. C’est-à-dire, par exemple, l’utilisation dans la communauté gay du masochisme pour dépasser l’obstacle de l’organe est une expérimentation. Depuis les années 1970, quand dans le Castro, dans le quartier gay de San Francisco, dans les premières gay Pride, on a introduit le fist-fucking dans les relations sexuelles, c’était un masochisme ainsi déterminé, une technique sexuelle pour interroger les limites de l’organe. De la même manière, l’usage des drogues, calculé ou non, a toujours été un des apports du mouvement gay, l’utilisation – systématique – du popper dans les rapports sexuels, différent comme effet de celui que produit la cocaïne. L’utilisation du popper était aussi, comme le disait Lacan, une façon de couper le lien avec la queue, les drogues permettent, quand elles sont utilisées, d’aller au-delà. C’est une façon d’expérimenter si on met l’accent sur avoir une queue comme quelque chose qui détermine une communauté ou sur la queue comme instrument de jouissance, comme l’ont fait les communautés gay. Cela, en même temps, rend compte de toute une série d’expériences sur la façon d’aller au-delà et comment cela est vécu.
* Conversation intégrale sur « Reflexiones sobre tres cuestiones del feminismo con la no relación sexual », à écouter en espagnol sur Radio Lacan, 4 décembre 2019.
https://radiolacan.com/es/podcast/conferencia-en-el-palais-rouge-de-buenos-aires-reflexiones-sobre-tres-cuestiones-del-feminismo-con-la-no-relacion-sexual/3
Jean-Marc Josson, « Rompre l’effet de l’affect » (extraits)
L’homme dont il s’agit commence à consommer en prison, pour supporter, dit-il, les intimidations, les menaces et les violences. Il apparaît cependant, pendant son séjour en institution, qu’au-delà de celles-ci, il est l’objet d’une mauvaise intention de l’Autre, dont il livre la formule singulière : on cherche à se débarrasser de lui. Sa consommation lui permettrait de tamponner cette interprétation, qui est pour lui une certitude. […]
La consommation de cet homme est une tentative de traiter non pas sa certitude, mais l’effet que produit cette certitude dans son corps. C’est une tentative de traiter l’affect. […]
L’affect a pour origine la pensée, et non le corps ou l’âme. […] L’affect vient de la pensée, et va dans le corps ; il vient de la pensée, d’où « ça décharge » – formule qui met bien en évidence que l’affect est une « expression » de la pulsion –, et il va dans le corps, où ça dérange les fonctions, où ça provoque des dysfonctionnements. Ces perturbations empêchent tout équilibre, toute homéostase : « Nulle harmonie de l’être dans le monde… »[20], ajoute Lacan. […]
L’affect – et je souligne cette définition – est un effet. […] Cet effet affecte le corps, l’impacte, le marque. […]
L’affect est l’effet des mots […] l’affect fait du sujet de l’inconscient un être parlant, c’est-à-dire un sujet de l’inconscient doté d’un corps, un « corps parlant », comme le nomme Jacques-Alain Miller, un corps avec lequel il parle, et qui est affecté par la parole. […]
L’affect est donc l’effet d’un signifiant dans le corps. […]
C’est – je reprends mon hypothèse de départ – ce que tente de traiter la consommation. Elle vise à anesthésier ou à réduire l’effet d’affect dans le corps que produit sans relâche le signifiant qui se réitère. La consommation de drogue ou d’alcool devient toxicomanie ou alcoolisme quand – c’est ma deuxième hypothèse – elle est elle-même contaminée par la réitération à l’œuvre dans l’événement de corps. C’est alors que, rattrapée par cette répétition, la consommation s’emballe. […]
La morale du petit Hans, c’est d’une part que le petit garçon et la petite fille sont mariés avec leur queue, d’autre part que ce mariage est source d’angoisse. L’angoisse survient quand l’un et l’autre s’aperçoivent de ce mariage : elle est ce moment de la découverte du petit-pipi. Les choses se compliquent encore quand on gonfle le pénis – « Il n’y a rien pour mieux faire phallus »[21] –, c’est-à-dire quand se mesure la place du petit sujet dans le désir de l’Autre. C’est là que les mots, comme ceux de la mère de Hans, blessent et ravagent. Rompre le mariage avec le petit-pipi, c’est rompre l’effet d’affect de ce mariage. C’est ce que permet la drogue, et ce qui continue à faire son succès.
* Texte intégral publié dans Les Cahiers de l’ASREEP n. 2. Les addictions sans substances. Genève, 2018, p. 53-58.
Jean-Marc Josson, « Un possible lien » (extraits)
La consommation de drogue ou d’alcool est une tentative de traiter ces difficultés, ces impossibilités du lien à l’autre et au monde. Cette consommation peut avoir deux fonctions : rompre ou lier. […]
La drogue permet de rompre l’effet de l’affect que produisent les conséquences de la non-séparation. C’est la définition célèbre que donne Lacan de la drogue dans la dernière partie de son enseignement, éclairée par sa conception de l’affect à la même période. […]
La consommation de drogue permet également de lier, de faire lien à l’autre, au monde, à la réalité ou à la vie. Elle pallie alors la dimension du désir.
* Texte intégral publié dans Quarto 118. Lire Lacan. Bruxelles, 2018, p. 114-120.
Jésus Santiago, « La drogue de W. Burroughs : un court-circuit dans la fonction sexuelle » (extraits)
Ce que l’on nomme ici artefact de la drogue n’est donc pas un succédané de l’objet sexuel substitutif puisque l’inscription du registre phallique lui fait défaut. Cette manière spécifique d’opérer un court-circuit dans la fonction sexuelle équivaut à la difficulté qu’éprouve le toxicomane à supporter les filtrages relationnels imposés par le partenaire sexuel. […]
La technique de rupture, de séparation du toxicomane, à ce moment précis de la rencontre avec un partenaire, révèle son impasse avec ce qui lui a été transmis de la loi phallique, ce qui entraîne à son tour de laisser la fonction désir hors de sa portée. Il vous reste donc la technique du médicament en réponse. Il lui reste enfin cette stratégie qui m’amène à concevoir la toxicomanie comme un cas exemplaire de la profusion, dans la civilisation de la science, d’un court-circuit propre des solutions non phalliques de séparation entre le corps et la jouissance.
* Texte intégral publié dans Quarto 79. Paradis toxiques. Bruxelles, juin 2003, p. 52-54.
Jésus Santiago, « Drogue, rupture phallique et psychose ordinaire » (extraits)
Ce caractère artificiel de fabrication de la satisfaction, de style monotone, obtenu dans le circuit fermé du corps et de la drogue – satisfaction qui apporte en elle-même le refus des semblants de l’Autre – renvoie à la conception de la toxicomanie comme un type clinique qui se définit par la rupture de la fonction phallique. Ce refus des semblants de l’Autre qui se traduit par la rupture phallique est ce qui permet à J.-A. Miller de postuler la toxicomanie sur l’horizon de la jouissance cynique. Il faut donc établir une distinction essentielle entre l’autisme de la jouissance dans le cynisme ancien, propre à la masturbation publique, et la jouissance du toxicomane, propre à la satisfaction toxique. Si elles coïncident dans le mode d’inclusion de l’Autre, convergent dans le rejet des semblants de la civilisation, les deux divergent cependant en ce qui concerne la jouissance phallique.
Le cynique ancien se contente de la jouissance auto-érotique masturbatoire et de la valeur phallique qui est déduite de cette stratégie pour obtenir une certaine harmonie entre la jouissance et le corps. Dans cette recherche compulsive d’une satisfaction artificielle et fabriquée, le toxicomane donne des signes qu’il y a des défauts dans le dispositif phallique qui favorise le fonctionnement possible de la jouissance nécessaire pour un être parlant. De ce point de vue, il ne se confond pas avec le mode de jouissance du cynique ancien, puisqu’il réagit de manière distincte au mariage que l’être parlant est amené à faire avec le phallus. Le toxicomane est précisément celui qui ne consent pas au mariage avec la jouissance phallique et, par conséquent, il ne le conçoit pas comme une issue viable, parce que sa fixation réside dans le réel de la jouissance qu’il tire de sa relation avec l’organe pénien. Pour le cynique, au contraire, peu importe que la jouissance phallique ne convienne pas aux rapports sexuels, car elle s’attache pourtant à l’autisme de la jouissance. Le toxicomane, à son tour, est un contestateur du phallus et de la jouissance qui s’en dégage, ou encore de la jouissance dont l’être parlant a besoin. On remarque la façon dont le toxicomane, avec sa jouissance seule de la drogue, s’insurge contre cette nécessaire jouissance phallique qui, selon Lacan, bien qu’elle soit une « jouissance (qui) ne convient pas – non decet – au rapport sexuel, il n’y en a pas d’autre, s’il y en avait une autre ».[22]
[…]
La portée clinique de la vision lacanienne de la toxicomanie implique de considérer la drogue comme un objet qui cherche à combler les lacunes de la fonction phallique, en vue de son rôle dans la réalisation d’une jouissance qui conserve une certaine affinité avec la parole. Autrement, la présence insistante et compulsive de la drogue dénote l’impasse du sujet par rapport à la jouissance qui convient, la jouissance pulsionnelle qui, sous l’effet de l’incidence de la castration, rencontre ses objets, qui se constituent en Ersatz, car ils voilent et en même temps dévoilent la castration. L’essentiel de la définition de la drogue, promue par Lacan en 1975, est la thèse que sa pratique méthodique exprime les difficultés qu’éprouve le toxicomane à être fidèle au mariage, que tout être parlant établit un jour avec son partenaire-phallus.
[…]
Au fond, ce qui se dégage comme spécifique à l’acte de toxicomanie est la rupture fondamentale avec la jouissance découlant de ce partenariat, nécessaire pour tout sujet, car c’est elle qui favorise le plus-de-jouir qui convient. On observe ainsi que cette définition se structure sur la base de la considération selon laquelle le mariage de l’être parlant avec le phallus, ou même de la jouissance qui en résulte, est rejeté au nom de son lien fort avec la jouissance de sens qui s’exerce sur l’organe pénien.
Dans la clinique, pour manipuler une telle définition, il est nécessaire d’évaluer le médicament comme un facteur de séparation du mariage avec le pénis et non avec le phallus. En d’autres termes, le toxicomane est un sujet qui reste marié à la jouissance des sens qui gravite autour de l’organe, parce qu’il n’a pas établi un lien possible avec le phallus. Il ne faut donc pas confondre le phallus avec l’organe pénien, ni même avec toute représentation imaginaire ou avec l’idée qu’il s’agit naturellement d’un privilège masculin. En tant que fonction, le phallus est un opérateur, un signifiant de la jouissance, qui se situe hors-corps. Le paradoxe est que cet opérateur situé hors-corps est destiné à désigner, au moins partiellement, les effets de la jouissance sur le corps. C’est un signifiant asémantique, qui ne signifie rien et qui, comme incarnation du rien, ne peut fonctionner favorablement au moment de l’initiation sexuelle, occasion dans laquelle le sujet se trouve confronté au mystère de l’Autre sexe.
Dans son commentaire de « L’éveil du printemps », Lacan propose que l’initiation sexuelle est plus favorable à la vie, quand, levé le voile, au moment où l’adolescent est confronté à la construction du partenaire sexuel, se révèle ce rien inhérent au phallus. On conçoit ainsi ce rien comme la contrepartie de ce qui éclate, dans l’adolescence, comme indice de la viabilité du plaisir phallique, qui s’articule avec le savoir, avec la parole. Si le toxicomane est marqué par la rupture phallique qui s’exprime dans sa difficulté à faire face à la jouissance du corps, cela découle du fait qu’en fonction de son attachement à la jouissance du sens autour du fait-pipi [Wiwimacher], ce rien n’a pas de place. La rupture phallique équivaut ainsi à l’excès de sens qui se produit au moment de la rencontre avec l’Autre sexe, un excès perturbateur de l’initiation sexuelle, qui bloque, alors qu’il devrait être énigmatique et sans sens dans la jouissance sexuelle.
On remarque encore que la clinique de la rupture phallique présente dans les phénomènes découlant de l’usage toxicomane de la drogue ne se déduit pas directement de la forclusion du Nom-du-Père, même parce que, s’il en était ainsi, on pourrait être face à des phénomènes typiques des psychoses, le délire et l’hallucination. On peut dire que la rupture phallique émane de la logique même de l’élision du phallus dans le fonctionnement de la jouissance et que, pour des raisons concernant l’impact contingent du signifiant sur le corps, il est interdit au sujet la jouissance qui convient à l’inexistence du rapport sexuel. La thèse de la rupture phallique comme facteur dominant dans les toxicomanies illustre une inversion dans l’ordre des facteurs caractéristiques de l’actualité clinique, c’est-à-dire qu’on ne pense plus au trou dans la signification phallique uniquement en conséquence du trou du Nom-du-Père.
Au contraire, le Nom-du-Père devient un prédicat de la façon dont le symptôme et la fonction phallique organisent et ordonnent la jouissance pour le sujet. Selon Miller, il cesse d’être le nom propre d’un élément particulier appelé Nom-du-Père. C’est ce qui se présente par la question : le sujet a-t-il le Nom-du-Père ou il y a forclusion de celui-ci ? De nos jours, le Nom-du-Père n’est plus un nom, mais le fait d’être nommé, d’avoir une fonction ou, comme l’affirme Lacan, d’être « nommé à »[23]. Bref, le Nom-du-Père n’est plus un nom propre et devient, selon la définition de la logique symbolique, un prédicat relatif au trou de signification phallique:
NP (X) –> X = rupture phallique
À mon avis, cette formulation rapproche ce qui est peut-être considéré comme un nouveau symptôme caractéristique de la toxicomanie du champ des psychoses dites ordinaires, dans le sens où la satisfaction obtenue avec la drogue, ainsi que par d’autres modalités, par exemple, par des tatouages et piercings, peut fonctionner comme un « substitut substitué »[24]. Si le Nom-du-Père est un substitut du Désir de la Mère, car il impose son ordre à la jouissance de celle-ci, la drogue peut se révéler un « substitut substitué ». En d’autres termes, la drogue peut être un Nom-du-Père dans la relation que le sujet a avec son corps. Dire que ces techniques de corps – entre autres, les drogues et les tatouages – peuvent être des « substituts » du Nom-du-Père est une manière de traduire ce que vient à être ce signifiant pris comme prédicat. Ce qui s’avère être une méthode de court-circuit dans la sexualité inhérent à la satisfaction toxique est beaucoup plus, en termes de Miller, un « faire-croire compensatoire »[25] [compensatory-make believe] du Nom-du-Père, dans le sens où il rend possible une solution aux désordres de la jouissance dans la vie d’un toxicomane. Depuis cette clinique du « faire-croire compensatoire », on valorise la continuité entre les territoires de la névrose et de la psychose, on met l’accent sur ce qui les rend contigus, deux modes de réponse à un même réel, car il s’agit, sous cet angle, non pas de fixer des frontières, mais de constater des nouages, des agrafes, des débranchements, des dénouages entre fils qui sont en continuité.
* Texte intégral publié dans Pharmakon Digital n. 3, disponible ici : https://pharmakondigital.com/droga-ruptura-falica-e-psicose-ordinaria/
Fabián Naparstek, “Introduction à la clinique des toxicomanies et de l’alcoolisme” (extraits)
Pour que le phallus soit inscrit, il ne suffit pas que quelqu’un ait un pénis, il faut aussi que cet organe réponde au mot. Ainsi, l’inscription du phallus coïncide, d’une certaine manière, avec cette relation entre un organe et le mot, qui est ce que Lacan appelle ensuite « faire d’un organe un instrument »[26] […] Il y a une erreur commune, dit Lacan, à confondre le réel de l’organe avec son articulation au signifiant en tant qu’instrument, qui apparaît pathétiquement dans l’exemple des transsexualistes. Avec les conséquences funestes que, au niveau subjectif, les opérations des transsexuels entraînent souvent.
[…]
L’excès propre à la toxicomanie montre très bien cette dimension hors régulation phallique. S’il y a une fonction que le phallus a, par excellence, c’est de mesurer les choses. […] A mon goût, l’overdose devrait être considérée hors mesure phallique. La rupture possible avec le phallus est ce qui fait que l’on passe à la manie toxique, en comprenant la manie, comme ce qui amène le sujet hors d’un ancrage phallique. Ainsi, en suivant ce que nous avons développé, on peut vérifier différentes utilisations de la drogue. Il y a un usage de la drogue qui – considérant le cas présenté –, lui avait permis de rester marié à son organe. Il y a une autre utilisation qui permet à certains sujets de prendre courage et d’affronter l’Autre sexe et de mettre en fonction le phallus. […] Nous avons également vu comment ce qui peut commencer dans une tentative de conserver le mariage avec le phallus ou dans une tentative de le mettre en fonction, se défait finalement, se détache du phallus et provoque la manie du toxique. [Référence à une vignette clinique présentée dans le livre]
[…]
Ne rien vouloir savoir de ce qui concerne le sexuel, si nous comprenons le sexuel en termes phalliques, ce n’est pas seulement la rencontre avec le corps de l’Autre sexe, mais peut être la rencontre avec le corps du même sexe, qui peut être la masturbation elle-même, ce qui n’empêche pas de distinguer une chose de l’autre. Cette façon millérienne de poser les choses est en continuité avec l’idée de Lacan sur la rupture avec le phallus. […] On peut faire usage de la drogue pour « faire appel à l’insoumission au service sexuel »[27], pour rester coincé dans la jouissance de l’onanisme comme soudure, pour essayer d’accéder à l’Autre sexe comme une béquille, en termes de Freud. Je parle de la béquille lorsque le phallus a ses limites – qui sont toujours de structure –, et le sujet ne supporte pas ces limitations et, par conséquent, tente de soulever le phallus pour accéder à l’Autre sexe.
[…]
Si nous avons une thèse à partir de laquelle la toxicomanie implique une rupture avec le phallus, […] et dans la psychose cette rupture est une rupture de structure, la thèse de la rupture ne peut pas nous servir. Nous partons de l’idée, pour le cas de la névrose, qu’il y a eu une rupture qui est conjoncturelle et dans la psychose, à la suite de Lacan, nous avons l’idée que cette rupture est structurelle… […] Si nous ajoutons à cela que de plus en plus, dans la clinique, nous recevons des sujets toxicomanes qui sont diagnostiqués comme psychotiques, l’importance de pouvoir situer comment penser la toxicomanie dans la psychose augmente.
[…]
Un sujet raconte qu’avant de le connaître (le Viagra) il ne pouvait pas maintenir des relations car il ne ressentait pas de désir, mais il ajoute qu’il voulait être comme les autres. Il dit qu’avec le Viagra, il a commencé à être comme les autres et à son avis, il a également commencé à réguler ses érections. L’organe n’est plus lâche, mais il réagit aux pilules. Alors que de temps en temps, il continue d’avoir des « érections lâches » maintenant il le justifie comme un résidu de Viagra dans le corps. […] on voit aussi dans ce cas, qu’à défaut d’une opération qui produit la carence du signifiant liant l’organe comme un instrument, ce qui vient à la place du signifiant est le chimique, et c’est à partir de celui-ci qu’on tente de transformer l’organe en instrument. […] Au lieu du mot, à défaut de ce mot, le sujet utilise la pilule. Une opération dans le réel, pour donner une liaison à l’insupportable invasion de jouissance de l’organe. […] Dans ces cas de psychose on voit très bien que la drogue n’est pas seulement une rupture avec le phallus mais c’est ce qui essaye de lier ce petit pipi au corps.
* Texte intégral publié dans « Introducción a la clínica de las toxicomanías y del alcoholismo ». Livres I, II, III. Buenos Aires, Grama, 2008.
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